Les expressions oubliées des années 80 – Vol 3

“Le télégramme de félicitations”

 

Dans les années 80, lorsqu’on voulait communiquer de manière écrite, y avait le courrier. Et rien d’autre. Ou presque.

 

Pour faire parvenir un écrit à une personne en quelques heures, on avait recours au télégramme, un procédé barbare datant du 19ème siècle. C’est un système de transmissions de signaux à distance, basé sur le code Morse. En fait c’est bien plus complexe que ça, mais si je vous résume toutes les étapes du télégraphe, z’allez vite déguerpir.

 

Envoyer un télégramme était très onéreux car chaque mot était payant. C’était donc réservé aux plus nantis, comme les hommes d’affaires, politiques ou militaires, pour diffuser toute information qui ne pouvait pas attendre le courrier du lendemain. Vous l’aurez compris, c’était un caprice de riche. A ma connaissance, ni ma grand-mère, ni le voisin, ni vos cousins éloignés n’ont un jour eu recours à l’envoi d’un télégramme.

 

Exemple de télégramme : AI APPRIS L HEUREUSE NOUVELLE – STOP – FÉLICITATIONS – STOP – VIVEMENT LE PROCHAIN VOYAGE OFFICIEL QUE LE CHAMPAGNE COULE A FLOTS – STOP

Les médias étaient alors tout heureux de pouvoir annoncer au petit peuple que “Le Premier Ministre avait envoyé un télégramme de félicitations à son homologue belge”, sans pouvoir en dire davantage, le principe du télégramme étant qu’il restait privé.


Equivalent 21ème siècle : “Le Tweet d’insulte” : la confidentialité ayant perdu tout son sens, la mode est à la publication de brefs messages sur les réseaux sociaux, histoire de saouler tout le monde avec des salades privées. Et miracle de la technologie, les -STOP- sont remplacés par des mots à la con précédés de sigles étranges.

Exemple : “@Machin est ministre de l’éducation et il sait pas faire une #division. Non mais allo quoi !! #Jesuistotalementridicule”

 

“Allo les stations, c’est pour un essai TX”

 

Attention, public de connaisseurs nostalgiques exigé !!!

Dans les années 80, il y avait plusieurs langages secrets qui permettait à une communauté de se comprendre sans que le commun des mortels n’entrave grand chose … on a eu le javanais, le verlan, le louchebem … et le cibiste !

 

Le cibiste était une créature à part sur les routes de France, car il utilisait un appareil spécial fixé au tableau de bord : la C.B. (prononcez “cibi”, de l’anglais Citizen Band). Elle permettait aux routiers et automobilistes de s’échanger différents tuyaux comme la présence d’embouteillages, d’accidents, de radars etc …

 

Et lorsque la route était “propre”, les cibistes se racontaient leur vie, quelques blagues, les meilleurs emplacements pour trouver des filles de joie, ou la dernière émission de Max Meynier.

 

 

En raison du caractère communautaire du réseau cibiste, un langage spécial était en usage, pour pouvoir se comprendre entre initiés. La phrase la plus fréquemment entendue était :

 

“Allo, les stations, c’est pour un essai TX !”, qui signifiait à peu de choses près :

“Chers amis, bonjour, j’effectue actuellement quelques tests au moyen de mon émetteur à canal banalisé. Je vous saurais gré de me confirmer la bonne teneur de mon émission par un rapide retour de votre part”

Mais on entendait plein d’autres phrases semi-codées, telles que :

“ Gaffe VX, Papa22 et sa boîte à image à 10 bornes” : “Mon vieux complice, j’ai le plaisir de t’informer de la présence de nos chères forces de l’ordre en aval de ton trajet, prend donc garde à ne point trop appuyer sur le champignon si tu ne veux pas finir sur ces charmantes photos souvenir à 300 francs pièce”

 

Ou alors :

“89, YL, en attendant le 144 + 2 !!” : “Chère demoiselle, j’ai l’honneur de vous demander votre main” (je vous laisse chercher une traduction plus fidèle 😛 )

 

Equivalent 21ème siècle : “Pour être averti des dangers de la route, veuillez mettre votre Coyote à jour pour seulement 11,99 euros par mois” Et oui, finis les grésillements, les blagues dégueu et les changements de canaux … les avertisseurs de radars, GPS et autres Coyote ont tué la CB …

 

Ne ratez pas bientôt “La C.B. expliquée à mon enfant”  !! (c’est fou ce que la rédaction d’un article à la con peut donner envie d’écrire d’autres articles à la con 😀 )

 

T’es dans l’annuaire ?

 

Au début des années 80, le top-class en matière d’équipement des foyers, c’était d’avoir le téléphone. Avec fils, écouteurs, cadran et tout l’attirail. Heureusement, le téléphone a très vite rejoint la plupart des maisons, permettant à des millions de gens d’en joindre d’autres millions.

 

Mais comment faire pour retrouver des amis de passage, ou de vagues connaissances pas suffisamment intimes pour noter leurs coordonnées dans nos répertoires ? Grâce au livre le plus utile qu’on ait pu inventer depuis “L’opération à coeur ouvert pour les Nuls” : L’Annuaire téléphonique des PTT !!

 

Ce gros bouquin divisé en 2 parties, l’une blanche pour les particuliers, et l’autre jaune pour les professionnels, recensait les numéros de l’ensemble des abonnés au téléphone. Classés par ville, puis par ordre alphabétique, selon la célèbre blague, ce livre manquait cruellement d’action, mais avait un sacré paquet de personnages (N’oubliez pas d’insérer dans les commentaires un smiley qui montre que vous vous êtes bien forcés à rire).

 

Il était ainsi facile de retrouver le numéro d’un copain de vacances, ou d’un camarade de classe qui ne se souvenait pas de son numéro. Il suffisait de demander “Tu es dans l’annuaire ?” “Oui oui, tu me cherches dans la ville de Saint-Picorette-lès-Bains, mon père s’appelle Jean-Pierre François

 

Si on demandait à son camarade s’il était dans l’annuaire, c’est parce que d’une part, tout le monde n’avait pas le téléphone, et d’autre part parce que certaines familles désiraient ne pas y figurer pour ne pas recevoir d’appels de plaisantins ou de vendeurs de cuisines. On disait alors qu’on se trouvait “sur la liste rouge”

 

L’annuaire n’est guère plus utilisé depuis l’avènement des recherches sur internet, plus rapides, plus pratique et moins volumineuses. Mais bizarrement, il est toujours aussi stupidement envoyé à tous les foyers, même ceux qui ne s’en servent jamais. Combien de fois ai-je demandé à ne plus recevoir ces gros trucs inutiles pour économiser du papier et de l’argent à l’opérateur historique … et combien de fois l’ai-je tout de même reçu dans ma boîte à lettre en soupirant de dépit …

 

Il est donc relayé au rang de cale pour meuble (très) bancal, de rehausseur pour chaise basse, ou de distributeur de papier pour allumer le barbecue. Triste fin pour un bouquin révolutionnaire.

 

Equivalent 2000 : t’as une adresse mail ?

Equivalent 2010 : t’as un profil FB ?

 

Le cachet de la poste faisant foi

 

Voilà un exemple d’expression qu’on ne comprenait absolument pas quand on avait 7-8 ans, mais qu’on retrouvait sur tous les jeux-concours de l’époque.

 

Traduction :

Dans les années 80, le moyen le plus simple de participer à un jeu concours, c’était le courrier. Mais pour avoir une chance de gagner un lot ou de participer au tirage au sort, il fallait envoyer sa carte postale dans les délais impartis par les organisateurs. La date limite de participation était indiqué, suivi de la mention “Le cachet de la Poste faisant foi”. Sous-entendu “Si vous postez votre lettre ne serait-ce que quelques minutes après que ce charmant postier ait fini sa tournée de tamponnage de courrier, c’est mort !”

 

Cette expression n’est plus vraiment employée, dans le cadre des jeux-concours, car il n’y a plus beaucoup de personnes prêtes à envoyer une carte postale pour gagner quoi que ce soit. Mais elle reste utilisée pour certains dossiers de candidature, demandes de remboursement ou pour profiter d’une promotion.

 

Equivalent 2010 : “Si tu veux éjecter Kévina des Anges du Loft et gagner un IPhone Samsung Galaxberry 128-S ultra kiffant, envoie “Dégage” au 83 554 avant la prochaine page de pub (54,23  € par SMS)” ou “Pour participer au tirage au sort qui te fera gagner des trucs pourris que t’as pas besoin, Like cette page et partage la sur ton mur Facebook avant la fin de semaine, objectif 10000 “J’aime” avant dimanche !!! lol <3 <3 <3 ” (Je trouve vraiment désolant que tant de personnes jouent le jeu comme de braves moutons, et pourrissent par la même occasion les pages de leurs amis, en sachant parfaitement que jamais ils ne gagneront quoi que ce soit. Saleté de 21ème siècle … )

 

Voici les liens vers les 2 premiers articles consacrés aux expressions des années 80 : VOLUME 1  – VOLUME 2

 

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