Si on s’amusait à classer les comédies françaises des années 80 par leur popularité, on distinguerait rapidement 3 catégories.
Certains films sont devenus des incontournables, régulièrement rediffusés à la télé, parfois jusqu’à l’overdose (La soupe aux choux, Le Père Noël est une ordure ou les Sous-doués par exemple), et d’autres sont totalement tombés dans l’oubli. Mais la troisième catégorie est la plus intéressante : celle des films à la notoriété intermédiaire. Généralement, on peut y voir de belles scènes de la vie de tous les jours, des objets désuets, des marques disparues, et plein d’autres pépites visuelles, celles qui font tant de bien aux âmes nostalgiques.
On va vous parler d’un de ces films : Viens chez moi, j’habite chez une copine. Pourquoi celui-ci, et pas un autre comme Marche à l’ombre, Nuit d’ivresse, Les Keufs, ou Pour cent briques t’as plus rien ? Tout simplement parce que j’ai revu ce film il n’y a pas longtemps, et pour deux trois autres raisons que je vous dévoilerai tout au long de cet article. Mais ne vous inquiétez pas, quand l’envie m’en prendra, d’autres films seront mis à l’honneur.
“Viens chez moi, j’habite chez une copine” est une comédie d’autant plus sympathique à regarder qu’elle nous raconte les péripéties d’un jeune couple tout mignon et sans histoires, bousculé par l’arrivée d’un pote, qui va foutre un bordel monstre dans leur vie 😉 Une histoire assez classique, mais mise en scène avec tendresse, humour, et surtout servie par des acteurs touchants.
Je vous raconte l’histoire ? Allez, en route !
Françoise et Daniel (joués par Thérèse Liotard et Bernard Giraudeau) forment un jeune couple parisien typique du début des années 80.
Elle est tendre et jolie, il est grand et costaud. Oh, ils ne roulent pas sur l’or, loin s’en faut. Ils vivent dans un deux-pièces, il est déménageur, et elle est serveuse au Mc Do. Mais ils s’en foutent, ils s’aiment, et leur petite routine faite de métro, de boulot, de dodo, d’amour et d’eau fraîche leur convient parfaitement. Jusqu’à ce que le drame arrive.
Dans un film catastrophe, le “drame” se présente sous la forme d’un tsunami, d’une invasion extra-terrestre, d’une attaque de tomates tueuses, ou tout autre cataclysme bien flippant.
Dans une comédie comme “Viens chez moi, j’habite chez une copine”, le “drame” prend la forme d’un être humain : Guy, le meilleur copain de Daniel, interprété par Michel Blanc.
Guy est un jeune paumé, un peu flemmard, fauché, sans réel but dans la vie. Petit, frêle, au physique plutôt peu avenant, il erre de petits boulots en petits boulots. Car oui, en 1981, il y avait encore du travail, même pour les plus réfractaires aux efforts 😉 Guy est en revanche un baratineur hors pair, séducteur, beau parleur, qui arrive à ramener dans sa piaule un nombre incalculable de minettes. Et pas que des cageots, croyez-moi !
Il débarque dans la vie de nos deux tourtereaux le jour où il se fait virer de son job de pompiste. A force de trop vouloir arnaquer les clients, ça finit par se voir, et le boss n’est pas content. Mais Guy ne se démonte pas, il sonne chez Daniel et Françoise, et se tape l’incruste “juste pour deux ou trois jours”. Et là, nos deux jeunes amoureux n’ont absolument pas conscience qu’ils ont fait entrer le loup dans la bergerie.
Leur quotidien se trouve totalement bouleversé. Non content d’abuser de leur hospitalité et de squatter leur salon en prenant de plus en plus de place, Guy devient très vite un véritable parasite. Sans-gêne, râleur, il taxe sans arrêt de la thune à ses hôtes, leur emprunte leur chambre, leurs fringues, pioche dans le frigo …
les “deux ou trois jours” prévus au départ se transforment en semaines. Il va même demander à Daniel de le pistonner pour rentrer dans sa boite de déménagements. Il fout le feu à la cuisine, ramène des tas de gonzesses à l’appartement, et bien sûr, ces demoiselles n’ont d’yeux que pour le beau Daniel, au grand désespoir de Françoise.
Mais on ne peut même pas en vouloir au pauvre Guy. Il est touchant, et même attendrissant. Et quand il se met à bafouiller des excuses (bidons) ou à s’apitoyer sur son sort, on lui pardonne tout.
Bon, ceci dit, notre lascar va pousser le bouchon bien loin 😉 Petit à petit, il repousse les limites de l’acceptable. Poussée par une foldingue artiste de cirque (jouée brillamment par Anémone), il va tenter d’organiser une partouze avec Françoise et Daniel. Il va également piquer pour 3000 balles de pinard lors d’un déménagement, ce qui coûtera à Daniel de se faire virer pour vol (le pauvre, lui qui n’y était pour rien !). Et surtout, il va arranger le coup et jeter Daniel dans les bras d’une de ses copines. Et bien sûr, Françoise sera mise au courant. Je ne vous raconte pas la suite, mais vous vous doutez bien que le mignon petit couple sans histoires va prendre un paquet de plomb dans l’aile …
Voila pour l’intrigue, qui peut sembler une succession de gags et de situations pas vraiment crédibles. Mais l’ensemble est très bien mis en scène par Patrice Leconte, et malgré le côté presque caricatural des protagonistes, on y trouve une forte dose de réalisme. Comme si cette histoire pouvait arriver à chacun d’entre nous, et qu’on pouvait s’y identifier. Soit en étant les pauvres hôtes trop gentils, soit en devenant ce profiteur qui démolit tout sur son passage 😉
Cette comédie de 1981, tirée d’une pièce de Luis Rego et Didier Kaminka, se voit et se revoit avec beaucoup de plaisir. Il ne s’agit pas du film le plus célèbre des années 80, certes, mais c’est tant mieux, il est programmé de temps en temps, mais ses rediffusions restent raisonnables. Superbement servie par une distribution de qualité, elle nous fournit d’excellents premiers et seconds rôles. A commencer bien entendu par Michel Blanc, qui joue ici son premier grand rôle depuis les bronzés. Bernard Giraudeau est également en grande forme dans le rôle du bon copain trop gentil. Et Thérèse Liotard y est sublime dans son jeu d’actrice. Adorable au début du film, souriante et arrangeante, son regard se fait de plus en plus noir au fil des pérégrinations des deux compères.
On retrouve également bon nombre d’interprètes féminines (qui correspondent aux conquêtes de Guy). Parmi elles, Christine Dejoux qui jouait le rôle de la Francine dans “La Soupe aux choux” un an plus tôt, mais aussi de Gaëlle Legrand, qu’on avait également découvert dans ce même film. Et enfin, Anémone maîtrise à la perfection le personnage de la fofolle qui tient à tout prix à sa partouze 😉
Et puis quel régal pour les yeux !! Viens chez moi, j’habite chez une copine nous offre un beau florilège de ce qu’était le Paris des années 80 : les anciens bus, les stations services et supermarchés où le franc était roi, les deudeuches, les cabines à pièces, les fast-food qui n’en étaient qu’au début de leur invasion, et plein d’autres détails de la vie quotidienne des 80’s.
Et malgré le ton assez léger du film, on retrouve tout de même un certain nombre de thèmes sur lesquels la société française ne pourra faire l’impasse par la suite. A commencer par la précarité et le chômage bien entendu, mais aussi les débuts de la crise du logement, les difficultés des couples, les femmes libérées et dragueuses (mai 68 est passé par là, vous vous doutez bien 🙂 )
Côté musique, le film est aussi célèbre que sa bande originale éponyme, composée et chantée pour l’occasion par Renaud. On retrouve dans ce morceau un parfait résumé de l’histoire 😉 A noter aussi que Renaud chante au début du film une chanson moins connue, mais également faite pour le film, “P’tit Dej Blues”. Autant la chanson principale est dédiée au personnage de Guy, “P’tit Dej Blues” nous parle de Daniel, et de tous ces mectons qui bossent dur pour gagner leur croûte.
De leur petite vie pépère faite de petites joies simple, leurs petites galères de smicard, mais au final de leur quotidien dont ils se satisfont. Jetez donc une oreille sur cette chanson, c’est une belle peinture du Paris ouvrier des années 80, je la préfère même à la chanson “Viens chez moi, j’habite chez une copine”.
Pour terminer cette mise à l’honneur de ce film, j’ajouterai simplement que “Viens chez moi, j’habite chez une copine” est une comédie importante pour moi. J’aime l’histoire, j’aime les acteurs, j’aime les images datées qu’on peut y voir, j’aime la BO de Renaud, et j’aime les souvenirs que me procurent ce film.
Car en effet, un beau soir de décembre 1988, il s’est agit du premier film enregistré grâce à notre magnétoscope flambant neuf. Le Père Noël avait glissé cette belle machine sous le sapin, à côté de la télé. Il avait eu aussi la bonne idée de mettre une cassette vierge. Alors on ne s’est pas prié de l’essayer dès le 26 décembre. Et c’est donc “Viens chez moi, j’habite chez une copine”, diffusé sur La Cinq, qui a eu le droit d’inaugurer notre vidéothèque.
Ce film, cette VHS, on l’a usée jusqu’à la corde de la bande magnétique. A l’époque, vous vous souvenez certainement, les cassettes vierges n’étaient pas données, et on ne pouvait pas s’en acheter beaucoup (surtout quand les parents venaient juste de se saigner pour offrir un magnéto à la famille). Alors on regardait les quelques cassettes qui trônaient sur l’étagère, à tour de rôle, les mercredis, les samedis, les dimanches, et pendant les vacances.
Voila pourquoi ce film est à jamais associé à ce souvenir hautement technologique de mon enfance. J’entends encore le déclenchement de l’enregistrement après l’appui sur Rec par le paternel, et toute la famille écoutant à la fois le début du film, mais aussi la bande tourner dans le magnéto en se félicitant du miracle.
Bref, je m’égare, mais au moins vous comprenez pourquoi je connais ce film par coeur, et pourquoi je voulais vous en parler ! Que vous connaissiez ou non ce film, n’hésitez donc pas à vous procurer le DVD, ou à ne pas louper la prochaine rediffusion !!
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